Restez vigilants et adaptez votre conduite !
Qui a dit que seuls les grands champions pouvaient rédiger des articles de bridge ? Dans ce format d’articles, des joueurs talentueux partagent leur expertise sur les donnes qui les inspirent le plus. Nous avons le plaisir de vous présenter ci-dessous un article captivant écrit par l’un des membres de notre communauté.
Zoom sur l’auteur
Jean Galand (sqzy sur Funbridge) est ingénieur dans le domaine de l’énergie et coach indépendant à Blanche Conseil et Développement. Adolescent, il a commencé le bridge en essayant de résoudre les problèmes du regretté José Le Dentu dans le Figaro que lui soumettait son grand-père. Mais c’est son oncle, moniteur de bridge à Sedan qui lui a appris les enchères et la différence entre un coup à blanc et un laisser-passer ! Jean Galand joue à Paris depuis 30 ans, deux à trois compétitions par an et est classé 1er série carreau. Son pire souvenir de bridge : largement distancée en finale nationale de junior par 4 à La Palmyre en 1995, son équipe a joué 2 fois le Bye…
Plus récemment, ayant fait le constat que la moyenne d’âge des bridgeurs ne pourra éternellement augmenter d’un an chaque année, il a décidé de s’engager pour transmettre l’esprit du jeu. Il est membre de la Commission des Finances du Comité de bridge de Paris, pour appuyer le Bureau et le Conseil Régional sur la préparation et le contrôle des budgets, à court et moyen terme. Il est moniteur de bridge depuis 2023. Son crédo ? Quel que soit votre classement, les méthodes de coaching permettent d’améliorer significativement votre niveau de jeu car elles vous aideront à vous placer dans le bon état d’esprit et à augmenter votre vigilance.
Restez vigilants et adaptez votre conduite !
Assis en Sud, après l’ouverture de mon partenaire de 1♣ et une intervention de 1♠ à ma droite, j’ai la main suivante.
Avec 13H, 2♠, 4♥, 5♦ et 2♣, je dois faire une déclaration. Mais mes 5♦ sont tellement anémiques que je décide de ne pas les nommer et de déroger en contrant pour indiquer 4 Cœurs. Sur sa redemande à 2♣, je cue-bid pour demander l’arrêt Pique et Argine en Nord annonce la manche à 3SA.
Comme attendu, Est entame d’un pique, le Valet de Pique. J’analyse l’entame : les Piques seront probablement 5332 et Est est intervenu à 1♠ dans RVXxx et au moins un des deux As mineurs manquants.
Je fais mon plan de jeu. Mes gagnantes sont au nombre de 5 : 2 Piques et 3 Cœurs. Je peux affranchir 3♣ en donnant l’A♣ et espérer les Cœurs 3-3. S’ils sont 4-2 ou que Est a les deux As mineurs, il semblerait que je vais chuter… en première analyse.
J’aurais donc intérêt à couper les communications adverses à Pique en laissant passer un Pique. Mais pas à l’entame car je dois protéger ma Dame de Pique.
Je prends donc l’entame du Valet de Pique de la Dame de Pique. Je rejoue 9♣ vers la D♣ et ♣ mais Est plonge de l’A♣. Est rejoue ♠ que je laisse passer et Pique que je prends de l’As en défaussant un Carreau du mort. Ouest fournit sur les trois tours de Pique. Je tire A♥ et R♥, tout le monde fournit. Je regarde la parité donnée par Argine. 9 puis 8 de Cœur en Ouest et 5 puis 4 de Cœur en Est. Les cœurs ont l’air 4-2… Bigre ! Je défile quand même mes Trèfles. Est défausse un Carreau puis un Pique. Tiens, c’est curieux !
Recomposons les mains : Est avait 5♠ et 2♣ et il a défaussé un Carreau, mais pas deux.
Comment expliquer sa défausse ♠ ? Il doit être gêné et a dû conserver le X♥ 4ème et l’A♦ sec. Sinon, il aurait jeté un 2ème Carreau, n’est-ce pas ?
Je joue donc Carreau vers la Dame et Est plonge de l’As, encaisse son Pique. Je défausse un Cœur et un Carreau du mort. Est sort Cœur et je table 3SA=.
Post mortem, je comprends que mon analyse initiale n’était pas complète… mais que mon réflexe naturel de bridgeur de couper les communications adverses m’a sauvé la mise.
En effet, si je n’avais pas laissé passer un Pique, je n’aurais pas eu le compte de la main d’Est et n’aurais pas eu la certitude qu’Est n’aurait pas défaussé dans RVXxxx (6ème).
Je comprends aussi que ma préparation mentale a payé : alors que mon instinct serait de continuer à jouer les Cœurs 3-3, je prends le temps d’analyser la situation au regard de cette défausse étrange pour tirer le meilleur de la complémentarité entre intuition et analyse.
Je comprends aussi qu’un champion aurait certainement imaginé dès le début du coup la chance supplémentaire qu’Est se trouve à l’étroit sur le défilé des Trèfles.
Techniquement, ce coup s’appelle un triple squeeze. Et il est facile à détecter : quand il arrive, l’adversaire squeezé fait « inexorablement » une défausse étrange, pour votre plus grande joie.
Note : vous aurez remarqué qu’il aurait été mieux joué en Est de ne prendre qu’au second tour de Trèfle pour empêcher le déclarant de tirer deux tours de Cœur.
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N’y avait-il pas une manœuvre de contretemps en commençant par jouer carreau vers la D ?
J’approuve ! Cela permet de gagner dès que l’As de Carreau est second ou 3e en Est, me semble-t-il.
Effectivement, si l’as de K est en E (probable vu l’intervention), et que les K sont 3-2, E est soumis au chantage. Soit il plonge de l’as et libère 4 plis à K, soit il laisse passer vers la dame, et le déclarant affranchit les trèfles.
Pardon de sortir du cadre et de l’objet de ces commentaires … Mais, les bridgeurs, que je sache, ne sont pas dispensés d’écrire en français ! L’emploi du verbe partager est réservé à l’expression : « faire des parts » et non à « faire part de ». Les anglo-saxons, eux, écrivent différemment, notamment quand ils échangent des commentaires sur les réseaux sociaux ; c’est leur affaire. Par pitié, ne les imitez pas à propos de notre jeu préféré ! N’avons-nous pas su, déjà, par ailleurs, nous français, nous distinguer d’eux en adoptant un système d’enchère original avec avantage ?
Je ne vois pas pourquoi Nord répète ses trèfles avec 4 cartes alors qu’il peut mettre 1SA ?