
Champions’ Cup 2025 à Jurmala

La Champions’ Cup 2025 s’est tenue à Jurmala, non loin de Riga en Lettonie. C’était la 3ème fois que j’allais là-bas et j’ai toujours hâte d’y retourner.
Cette année, notre équipe, les champions du Danemark, était composée de Leise Hemberg (capitaine), Katrine Martensen Larsen, Julie Marina Sigsgaard et moi-même. Katrine, la mère de Julie, et Leise venaient de débuter leur première saison ensemble en tant que paire.

Il y a 12 équipes dans chaque catégorie. Et en plus de la nôtre – les Dames -, il y a la catégorie Open. Cette année, seules nous les Dames défendions les couleurs blanche et rouge du Danemark.
La catégorie Dames est un peu spéciale car ce ne sont pas les 12 meilleurs pays des Championnats d’Europe qui se qualifient comme en Open.
Globalement, beaucoup est fait pour promouvoir le bridge féminin. Il y a 3 ans, on ne comptait que 8 équipes dans ce tournoi. Cette année, elles étaient 12. Les participants étaient les 8 meilleurs pays des Championnats d’Europe, le pays hôte (la Lettonie cette année) ainsi que les médaillées d’or, d’argent et de bronze du Championnat d’Europe Dames en ligne, un événement qui est aussi une initiative destinée à renforcer le bridge féminin en Europe. Il se tient chaque année – du 9 au 11 janvier 2026 pour la prochaine édition – et on peut même jouer de chez soi !
J’encourage toutes les femmes qui le peuvent à constituer une équipe et à participer. Il est important de soutenir le bridge féminin, d’autant plus que le prix à gagner est une place à la Champions’ Cup, compétition que je recommande vivement.
L’ambiance est toujours assez spéciale lors de ce tournoi. C’est un événement assez limité, avec seulement 2 catégories et 12 équipes dans chacune d’entre elles. D’importants efforts sont déployés pour qu’il ait lieu dans de petites villes du pays hôte. En même temps, on s’y sent incroyablement bien. La plupart des gens séjournent dans le même hôtel, vont manger dans les mêmes restaurants et se sont déjà rencontrés les années précédentes ou à d’autres tournois. C’est à la fois intimiste et familier.
Le tournoi dure 3 jours. Les 2 premiers, tout le monde joue un « round robin », c’est-à-dire un match contre chaque équipe. Cette fois-ci, il s’agissait de matchs de 10 donnes. Le 3ème jour, nous avons été réparties en groupes de demi-finales, de sorte que les équipes classées 1 à 4, 5 à 8 et 9 à 12 se rencontrent.
Une belle donne jouée par Katrine
Contrat : 4♠ joué par Sud. Les enchères se sont déroulées comme suit :


Un Cœur pour l’As, contre-attaque à Carreau, le Roi fait la levée.
Elle a ensuite joué un petit Pique vers sa main, plongé de l’As et joué un Carreau pour couper. Elle a continué d’un Coeur pour couper et Katrine a alors pu faire tomber les atouts restants.
Est ayant ouvert de 3♥ et déjà montré 3 Piques, les chances penchaient du côté de l’impasse à la Dame de Trèfle en Ouest.
10 belles levées.



Gérer une adversaire difficile – et une surlevée très satisfaisante
S’il y a bien une chose que je ne supporte pas à la table de bridge, c’est quand un adversaire se comporte mal. Je ne donnerai pas de noms, je ne veux pointer du doigt personne. Mais j’aimerais vous parler d’une donne dont je suis plutôt contente.
Les enchères se sont déroulées comme suit :


Julie et moi jouons Texas sur l’ouverture d’1♣ donc 1♥ montrait des Piques.
Mon enchère de 2♦ était double deux et par conséquent forcing de manche. Après cela, j’ai montré mes 4 Cœurs, puis mes 3 Piques. Nous nous retrouvons au contrat de 4♠.
J’ai reçu l’entame du 7♦ puis joué un Pique pour le Roi qui a fait la levée. J’ai donc joué la Dame de Pique pour l’As, puis retour Carreau.
Sur les 3 donnes précédentes, Nord nous avait déjà pressées ainsi que sa partenaire. Nous avons 100 minutes pour jouer 10 donnes, ce qui est amplement suffisant, surtout pour Julie et moi qui finissons habituellement avec 30 minutes d’avance. Quand elle a donc commencé à pousser le rythme sur la donne 1, cela n’augurait pas d’un match très agréable.
Je trouve que c’est petit d’obliger ses adversaires à se dépêcher, surtout quand on ne gaspille pas le temps. Et sermonner son partenaire parce qu’il prend le temps de réfléchir ne le fait sûrement pas mieux jouer. C’est peut-être une sorte de tactique d’essayer d’intimider ses adversaires, surtout si vous vous dites que vous jouez juste contre deux petites Juniors. Cela a eu un impact sur moi mais heureusement, pas de la manière dont elle s’y attendait probablement.
11 levées faciles semblaient réalisables sur cette donne. C’est aussi ce qu’a pensé Nord. Après que j’ai fait tomber les atouts et vu que les Carreaux se comportaient bien, elle a revendiqué 11 levées pour moi. J’ai poliment dit que j’aimerais jouer la donne.
Normalement, je revendique également quand c’est évident – cela fait gagner du temps -, mais son attitude et sa façon de tenter de dominer la table m’avaient provoquée.
J’ai donc continué. Elle a encore insisté sur le fait que le contrat ne pouvait faire que 11 levées. Cela a commencé à m’agacer quelque peu, je lui ai demandé poliment mais fermement de se détendre et de me laisser finir de jouer mes cartes. A ce moment-là, c’était plus une question de principe que de levées.
J’ai laissé filer les Carreaux et commencé à faire mes atouts. Voici les mains à ce stade :

J’ai alors joué mon dernier atout, défaussant le Valet de Trèfle, et Nord s’est retrouvée en difficulté.
Si elle défaussait l’A♣, mon Roi serait bon. Si elle défaussait un Cœur, c’est mon 10♥ qui le serait.
Elle a finalement défaussé un Cœur et j’ai réalisé 12 levées.
Habituellement, je ne me soucie pas trop de faire une surlevée dans un tournoi par équipes et j’essaie de maintenir une bonne ambiance. Mais ici, cette 12ème levée nous a rapporté +1 IMP, et c’est certainement l’IMP le plus satisfaisant que j’ai jamais marqué ! Je ne sais pas si c’est le karma ou non, mais j’espère qu’elle a retenu la leçon !
De bonnes enchères à la table de Leise et Katrine


Katrine a décidé d’ouvrir en Sud, où il est difficile d’éviter la manche.
De nombreux joueurs ouvrent en suivant la Règle de 20 (vos 2 couleurs les plus longues + vos points d’honneur doivent faire 20). C’est presque le cas de Sud.
Une main 5-5 est souvent très puissante, surtout à l’atout.
A ma table, on n’a pas ouvert en Sud et les enchères n’ont donc atteint que 3♠. Les deux contrats faisaient 11 levées. L’ouverture était donc bonne.
Un contrat de 3SA bien joué par Vicky Chediak
J’ai aussi sélectionné une donne que mes adversaires ont bien joué selon moi.
La déclarante en Nord était la norvégienne Virginia (Vicky) Chediak et le contrat était 3SA, atteint sans problème.

Si la défense entame d’un petit Pique, cela peut rapidement compliquer la donne pour la déclarante car cela donne 4 levées à Pique à la défense, et la déclarante ne peut pas atteindre 9 levées avant que la défense ne prenne la main. Mais beaucoup de joueurs ont choisi d’entamer Trèfle car l’entame à Pique semblait aussi dangereuse de la main d’Est.
Vicky a commencé par faire 2 gros Carreaux et il est vite apparu que les Carreaux étaient mal répartis.
Le problème est que vous devez éviter de laisser Ouest prendre la main. Si Ouest fait une levée, les Piques peuvent être traversés et le contrat chute.
Pour résoudre cela, Vicky devait jouer les Cœurs correctement. Sans trop réfléchir, la plupart des joueurs entameraient un petit Cœur pour la Dame après les 2 gros Carreaux. Mais si le Roi fait la levée, vous perdez une levée supplémentaire à Cœur si les honneurs sont répartis, et le contrat chute.
Après qu’elle a joué un petit Cœur au mort, j’ai aussi joué petit et elle a mis le 9 !
Si j’avais le Roi de Cœur, je pourrais envisager de plonger et de jouer un autre Pique, tuant ainsi le contrat.
Mais cela ne coûte rien non plus de laisser passer du Roi car elle peut pas encore compter 9 levées.
De fait, elle a fait le bon choix en jouant petit pour le 9. Ainsi, elle pouvait revendiquer 9 levées, les Cœurs étant aussi 3-3, ce qui lui a permis de réaliser un très bon score.
Mon ressenti sur la Champions’ Cup
Il n’est pas difficile d’imaginer que cette année, cette compétition n’a pas été le succès escompté pour nous.
Nous étions arrivées avec des attentes plus fortes mais avons dû nous rendre à l’évidence que le niveau était relevé et que ce n’était tout simplement pas notre tour cette fois.
Néanmoins, nous sommes reparties le sourire aux lèvres. C’est toujours fantastique de voyager, de gagner de l’expérience sur la scène internationale et de nouer de nouvelles amitiés au-delà des frontières.


Le tournoi s’est clôturé par la cérémonie de remise des prix pour les vainqueurs, un feu d’artifice, un gâteau et de la danse dans le hall de l’hôtel.
Comme l’a écrit l’EBL sur sa page Facebook :
« Cela va bien au-delà du fait que plus de la moitié des participants étaient des femmes, d’avoir franchi une étape historique en ayant une catégorie Dames qui tient parfaitement la route alors que personne ne pouvait l’imaginer il y a à peine 3 ans. La véritable réussite ici est celle de la communité incroyable de joueuses qui croît toujours plus à chaque événement, donnant au bridge féminin une place centrale dans ce sport ! »
Soutenir le bridge féminin permet non seulement de donner plus de poids à ce jeu, mais nous rend aussi plus forts.

La communauté décrite par l’EBL, nous la ressentons très clairement dans la salle où nous jouons, quand nous rions d’un malentendu sur une enchère ou quand nous encourageons d’autres équipes qui s’affrontent à côté de nous. C’est une petite communauté mais forte, à laquelle chacun contribue, que vous gagniez, perdiez ou donniez simplement le meilleur de vous-même.
Alors que de plus en plus de femmes émergent, tant la concurrence que les relations que nous construisons à travers les frontières se renforcent. Chaque équipe qui participe aide à faire avancer le bridge féminin, et cela me rend à la fois fière et reconnaissante de faire partie de cette marche en avant.
Pour moi, ce n’est pas que du bridge, c’est aussi faire partie de quelque chose qui grandit chaque année, quelque chose que nous créons ensemble.
Nous sommes aussi très reconnaissantes envers la fédération danoise de bridge de nous soutenir et de nous permettre de participer à la Champions’ Cup.

La devise de cette Champions’ Cup était :
« Survolez le jeu, maîtrisez le ciel. »
Et même si nous n’avons pas vraiment atteint le sommet cette fois, nous avons appris des leçons précieuses, et avec un peu chance, nous serons prêtes à voler encore plus haut l’année prochaine.
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