Un appel, ça ?
Éternelle question du bridgeur… à qui la faute, quel est le coupable ? Cet article est dédié à un domaine prétexte à bien des discussions au sortir des tournois, la signalisation.
Il est 17 heures, l’heure de prendre place pour le duplicate d’entraînement quotidien en ligne. En Est-Ouest, un couple encore jeune qui vise à bien figurer dans les prochaines épreuves mixtes. En Sud, un petit requin des salles numériques qui prend un malin plaisir à mystifier tout le monde à la table, à commencer par son partenaire, sérieux et bien élevé.
Après deux donnes banales, voici le diagramme qui s’affiche à l’écran:Donne 3, Sud donneur, Nord-Sud vulnérables.
Il n’y a pas grand-chose à dire des enchères:
La Jeune femme entame dûment de l’As de Cœur sur lequel apparaissent successivement le 6 du mort, le 2 et la Dame. Après quelques instants de réflexion, la Jeune femme rejoue le 9 de Trèfle. Bébé requin fait la levée de la Dame. Même en ligne, sa façon de ramasser la levée ne laisse planer aucune ambiguïté sur sa satisfaction. Après avoir enlevé les atouts, il rejoue Cœur pour affranchir sa dixième levée : il a réalisé cinq Piques, deux levées dans chaque mineure et une levée à Cœur. Nulle marque d’humeur, nulle réflexion sur la fenêtre de chat de l’un des deux partenaires de notre paire mixte en devenir. Mais tandis qu’un nouveau diagramme apparaît, la Jeune femme tarde à enchérir.
Les protagonistes de la salle ne le savent pas plus que les quelques spectateurs, mais son partenaire n’a pas résisté à l’envie de l’appeler au téléphone. Et la discussion n’est pas très amène.
– «Vraiment, quelle idée de rejouer sous ton Roi de Trèfle ! Je comprends que tu puisses avoir une réticence à continuer à Cœur mais tu peux contre-attaquer à Carreau sans risque, quand même !»
– «Écoute, tu as refusé les Cœurs, j’ai pensé qu’il fallait faire trois levées de Trèfle pour battre le contrat, j’en ai rejoué… Excuse-moi, mais toi qui es si malin, tu veux bien m’expliquer comment je pouvais savoir ?»
C’est à vous, maintenant, cher lecteur. Les thèses de la Jeune femme sont-elles défendables ? Le courroux du Jeune homme est-il justifié ? Y avait-il une façon différente de s’en sortir ? En un mot, à qui incombe la catastrophe ? Madame, monsieur, ou le Destin ?
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